Le lycée

Babel - traduire de l'italien

Par JULIE QUENEHEN, publié le mardi 27 mai 2025 11:10 - Mis à jour le lundi 16 juin 2025 08:41
Web radio du festival Littérature Live
Grâce au projet BABEL, les élèves italianisants de LVC (secondes, premières) et de LVB (secondes) ont pu expérimenter le métier de la traduction littéraire. Ils et elles ont rencontré la traductrice Romane LAFORE lors d'ateliers de traduction.

Le projet Babel - ateliers de traduction a été un projet très riche pour les élèves. 

Un projet riche en rencontres

Les élèves ont rencontré la traductrice littéraire Romane Lafore à deux reprises pour deux ateliers de traduction. Nous avons travaillé sur des extraits du roman de Nicoletta VERNA, I giorni di Vetro (à paraître chez Gallimard) et, à la fin du projet, nous avons appris que le roman a été récompensé par le prix de l'Union Européenne!  

Ils et elles ont ensuite rencontré Nicoletta VERNA elle-même, dans le cadre du festival Letteramente Lione, au lycée Brossolette.Ce fut l'occasion pour les élèves d'interroger l'autrice ainsi que de partager leur expérience de lecture avec d'autres lecteurs-lycéens.

Et pour conclure, les élèves ont participé, le 20 mai dernier, à une webradio en direct dans le cadre du festival Littérature Live, porté par la Villa Gillet. Lors de cette étape finale, nos élèves ont pu échanger avec les classes du Lycée Condorcet qui ont également participé au projet et la lecture des extraits a permis de confronter les choix de traduction. Nous avons pu organiser un temps d'échange partagé conclusif avec Romane Lafore autour de sa personnalité de traductrice, de son parcours de formation, des aspects très concrets de son métier. 

Un projet enrichissant culturellement et linguistiquement

La perspective de l'atelier de traduction a permis aux élèves (même parfois débutants) de se plonger dans la lecture ambitieuse (même partielle) d'un roman sur le fascisme de 478 pages!  Le roman choisi a permis d'évoquer de nombreuses connaissances historiques (période du fascisme) mais aussi philosophiques (question de la violence), et bien évidemment linguistiques (vocabulaire de la guerre, du fascisme, de la violence, de la domination/ question des registres de langue, familiarisation avec l'utilisation du dialecte). 

Les élèves ont également élargi leurs connaissances du métier de la traduction littéraire, en mettant la main à la "pâte", en interrogeant Romane Lafore sur son métier. Ils et elles ont également travaillé des compétences transversales utiles à leur formation de lycéens et lycéennes: prise de parole en public, oralisation d'un texte écrit, construction d'une présentation, théâtralisation d'une lecture. 

BABEL: ricominciamo l'anno prossimo?

 

Extrait de la traduction - I giorni di Vetro, début du livre. 

Redenta, la protagoniste, vient de naître et ce n'est pas un bébé comme les autres.

« Elle a quelque chose qui ne va pas, la pauvre », disaient les gens. 

« C’est la poisse » répétait ma mère tranquillement, en appuyant ma bouche contre son sein.

Mais elle a une belle frimousse, ajoutaient-ils, et ce « mais » était le signe de leur compassion. 

«Mais elle est gentille», «Mais elle est tranquille». 

Mais elle n’est pas comme les autres. 

«Bah comment ça se fait qu’elle pleure pas ?» demandait mon père le soir. 

«Elle pleurera. Les femmes finissent toutes par pleurer. » 

Lui essayait de me pincer les gambettes ou de me tourmenter avec son bâton pour que je bêle un coup. Je fermais les yeux, chouinais à peine. 

« Peut-être qu’elle a pas de voix », disait-il. Ou bien : « Peut-être qu’elle est aveugle. » 

« Je vous dis que c’est la poisse.” 

« Peut-être qu’elle est idiote et c’est tout, et maintenant qu’elle est là, je dois me la coltiner. » 

[...]

Marianna, la première de mes sœurs vivantes, naquit en septembre 1925, tandis que j’étais toujours immobile sur ma petite couche, incapable ni de marcher ni de parler.

Et moi qu’est-ce que je vais en foutre encore, d’une autre fille? beugla mon père en pestant contre sa déveine. 

Vous allez la garder et vous taire. 

Ma mère la déposa dans le berceau de bois avec moi, tête-bêche, mais Marianna se mit à pleurer et à crier si fort que ma mère dut la prendre dans son lit, entre mon père et elle. 

L’autre idiote, c’était presque mieux, marmonna-t-il, en essayant de s’endormir. 

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